Aiko
Inspiration japonaise
Derrière Aiko, il y a Gioia Seghers. Partie au Japon enceinte de son premier fils, elle commence ensuite à lui faire des vêtements pour les premiers mois de sa vie, notamment un kimono créé à partir d’anciens jeans et kimonos japonais ; puis naît l’envie d’englober toutes ces créations à travers un label et de lancer Aiko, deuxième prénom de son fils, qui signifie “enfant de l’amour”.
La genèse
Designer de mode, Gioia est diplômée de La Cambre à Bruxelles et crée des collections féminines plusieurs années durant, ayant déjà pour démarche de travailler avec des tissus existants. À moitié italienne, elle se rend à Prato pour récupérer dans les usines textiles des fins de rouleaux de tissus de très belle qualité, et crée ses collections en privilégiant des coupes intemporelles et une certaine élégance. La coupe kimono est déjà présente. À la suite d’un cheminement concernant ses envies et sa façon de créer, Aiko naît doucement et organiquement en 2019.
La philosophie
L’idée d’upcycling vient naturellement : « Il était commun dans ma famille de garder des vêtements des générations précédentes pour la qualité et la beauté du tissu. L’habitude de garder les belles matières, les beaux lainages. Et même si la coupe ne plaisait plus, les pièces restaient. J’ai été éduquée avec cette qualité des tissus. L’idée de créer moi-même des pièces uniques pour mes enfants était donc assez naturelle. Cela me plaît et m’a permis de redonner du sens à ce que je faisais. Aiko est un projet de transmission, de partage et de famille. »
Le cycle
Gioia source toutes ses matières en Belgique pour ensuite les couper et les coudre dans son atelier et deux autres également situés en Belgique. Après la récolte et le tri de chaque vêtement en cachemire, laine, coton ou jean, les pièces sont nettoyées, triées par couleur et par poids/densité de la maille ou du jean. Chacune est ensuite pensée individuellement à partir de la pièce existante (sa taille, sa couleur…), Gioia réfléchissant à ce qu’elle va devenir entre un pull adulte, enfant ou un bandana en cachemire.
En Vrac
Une histoire d’objets
En Vrac est une histoire d’objets de tous types, aux usages divers, collectionnés par Marine Nallet Barrabes, dessinatrice et créatrice de la marque ; une histoire d’objets trouvés et aimés, et surtout d’objets dessinés, chinés, fruits d’une quête, d’une chasse au trésor, dont des textiles : « C’est ce qui m’anime pour trouver les chemises et les sweat-shirts qui seront sérigraphiés de mes dessins (d’objets) et deviendront En Vrac », précise-t-elle.
La genèse
Marine a toujours chiné ses vêtements, pour leur singularité ou leur fantaisie. Elle a également toujours porté des chemises d’homme qu’elle trouvait aux puces, simplement parce qu’elle n’en trouvait pas à son goût dans les boutiques. Aussi l’idée d’upcycling lui est venue assez naturellement, étant finalement inhérente à sa relation au vêtement.
La vie en sérigraphie
Marine entretient une longue histoire d’amour avec ce savoir- faire : « Lorsqu’elle est artisanale, la sérigraphie peut s’adapter directement aux dimensions de chaque vêtement, à son relief et à sa surface. Elle est donc parfaitement adaptée à la fabrication de pièces uniques. C’est une technique que je connais bien et qui continue de m’émerveiller à chaque fois. »
La philosophie
Collectionner, dessiner, chercher des trésors, s’amuser, se rencontrer, apprécier les belles choses. En Vrac propose des pièces uniques, intemporelles et unisexes. « Chiner des vêtements, c’est aussi ne pas produire à nouveau, et ne pas participer à cette production textile qui a perdu tout sens commun… Mes pièces ne sont pas fabriquées, elles sont “embellies” en France par trois sérigraphes indépendants, deux femmes et un homme. »
Ensemble
Sourcer, créer, valoriser
Ensemble veut insuffler une nouvelle histoire aux matières premières dormantes. Derrière la marque se trouve un duo mère- fille : Pascale et Camille Gilbert, qui ont voulu conjuguer leur créativité dans un projet porteur de sens, avec la volonté d’essayer de consommer de manière responsable. Pascale, diplômée de l’Ensad, elle exerce un temps comme directrice artistique produits textile avant de créer avec son frère une entreprise de création proposant des articles à base de matières premières brutes, puis une start-up disruptive s’appuyant sur des collections existantes et des développements textiles made in France produits en nom propre. Et enfin Ensemble, en juin 2022. Camille, ayant sa propre agence d’architecture intérieure, elle ressent parallèlement l’envie d’aller plus loin et de mettre en application ses convictions écologiques, pour créer encore et toujours de manière responsable. Aussi rejoint-elle Pascale dans l’aventure. La philosophie Stocks dormants, pièces manufacturées écartées pour défaut, rebuts, chutes, ou tissus vintage chinés un à un… Aux yeux du duo, chaque matière mise de côté porte en elle une authentique émotion. En les revalorisant, Ensemble leur transmet un souffle singulier, leur appose sa patte créative et leur impulse une seconde vie.
Partir de l’existant
Sourcées en France et revalorisées en circuit court, ces matières premières sont le point de départ d’une aventure humaine qui implique plusieurs partenaires, de la création à la conception. Ce cheminement valorise différents savoir-faire, pour des créations entièrement fabriquées en France.
Cultiver une conscience durable
Ensemble a à cœur d’inscrire son approche dans une démarche écoresponsable issue de l’économie circulaire. Cette trajectoire vertueuse est nourrie par l’envie de proposer une nouvelle manière de consommer et de vivre. Le label fabrique à la commande, sans stock, en partenariat avec des ateliers de couture français, principalement à Roubaix.
Isabelle Collignon
New look
Derrière ce label éponyme se trouve Isabelle, à qui des études de stylisme permettent d’exprimer sa créativité et d’acquérir les techniques de la couture et du patronage. Diplômée, elle tombe dans l’univers des friperies à Bruxelles et transforme des pièces de seconde main, allant jusqu’à ouvrir un café-couture où elle donne des cours. Puis viennent Paris, les showrooms, le retail et l’image pour Sézane. En septembre 2023, forte de ses expériences, de ses voyages et de sa curiosité, et sa passion pour la couture et le vintage étant intacte, elle crée une marque qui lui ressemble, et qui se veut « humaine, joyeuse et respectueuse du monde qui l’entoure ».
La genèse
Née en Belgique d’une mère qui aime coudre et d’un père qui aime chiner, Isabelle considère très tôt le vêtement comme une affirmation de soi. Créer lui plaît : faire avec ses mains, du concret, dessiner, transformer, découdre et recoudre, détourner de son usage premier.
La philosophie
Constatant que nos garde-robes débordent d’une consommation textile toujours plus abondante et polluante, elle a besoin de donner du sens, d’être dans le réel en utilisant des ressources existantes. Son label est avant tout une envie de partager ce en quoi elle croit depuis toujours : l’artisanat, le fait main, le vivre local et durable.
Made in le Gard
Après avoir quitté Paris en juin 2022 avec son mari et leur fille, le trio s’installe à Uzès, dans le Gard, pendant un an, puis à Flaux, village de 350 habitants où ils trouvent un rythme qui leur plaît et un meilleur équilibre de vie. Isabelle y installe son atelier, les champs pour horizon. Tous ses modèles sont créés sur place, du sourcing à la création en passant par le patronage et la couture. « La démarche créative en upcycling se fait un peu différemment. C’est un tissu qui va m’inspirer, un imprimé, une matière, et ensuite je pense au modèle. Pour l’instant, ce sont principalement des gilets et des kimonos, car je veux des pièces intemporelles qui vont à tout le monde. »
Jess Meany
Wonderful world
Jess Meany crée sa marque éponyme en 2020 alors qu’elle emménage à Los Angeles et veut que son travail reflète sa nouvelle expérience ici. Elle se procure ses textiles localement sur des marchés aux puces et dans des usines textiles qui vendent leur surstock. « Je voulais inclure les murs colorés et les fleurs éclatantes qui remplissent la ville et prendre beaucoup d’images à l’extérieur, à la lumière du jour, pour partager la sensation du soleil ici. La marque est le reflet des gens et des matériaux qui m’entourent en Californie. »
La genèse
Jess a travaillé plus de dix ans comme développeuse de textiles et de vêtements pour des marques à New York. « C’est inspirant de créer de nouvelles pièces chaque saison, mais cela génère beaucoup de matériaux excédentaires et de déchets. Les rouleaux de tissus restants s’accumulent au sein des marques. Mon travail est d’utiliser ces restes, ainsi que des textiles dormants, vintage, antiques et oubliés. »
La philosophie
Jess voulait créer une activité qui lui rappelle son enfance à Falmouth, dans le Maine, ville remplie de magasins d’antiquités et de vide-greniers. « Travailler avec du matériel vintage ravive des souvenirs dont je ne me souviendrais peut-être pas autrement. Par exemple, j’ai cousu un manteau à partir d’un édredon que ma grand-mère avait confectionné pour mon père. Il porte sa signature à l’intérieur : “De maman à Brian, Noël 2010.” C’est ce qui rend un objet spécial : qu’il puisse transmettre une histoire sur les êtres chers qui vous entourent. La connexion avec les souvenirs émotionnels est le fondement de mon travail. »
La fabrication
Jess et son équipe de trois personnes sourcent les textiles, organisent et raccommodent les tissus et les coupons qu’ils muent en chemises, manteaux et robes. « Nous avons eu l’occasion de coudre avec des pièces uniques, comme des quilts en patchwork restaurés datant de 1895, des soies et des organzas créés pour des marques de mariage, de couture et de luxe. Les possibilités de création sont infinies en utilisant ce qui existe déjà ! »
Lucia Sellier
(Art)isanal
Lucia, artiste et architecte d’intérieur, a vécu avec le voyage comme mode de vie, allant de pays en pays avec un attachement particulier à la Grèce où elle a des racines familiales, et gardant de ces expériences un vrai goût pour l’itinérance, les couleurs, la danse, la mer et la lumière.
La genèse
Elle lance sa première collection de tapisseries contemporaines en 2020. « J’ai toujours eu une sensibilité pour les tissus et l’idée de trouver une façon de leur donner une seconde vie a cheminé en moi. Je voulais me lancer dans une démarche artistique mais aussi positive, engagée et au fil du temps ; en essayant différentes choses, j’ai abouti à l’idée de mes paysages. J’ai tâtonné, joué avec les contrastes de textures, de reliefs, de formes et de mouvements, jusqu’à développer ma technique de confection artisanale de revalorisation des matières. »
La démarche
Aujourd’hui, elle compose ses paysages dans son atelier avec des stocks de matières surtout naturelles (lin, coton, cuir) collectés auprès de marques, d’éditeurs de tissus, de recycleries et au hasard des stocks ; des fins de rouleaux et des matières dormantes qui n’ont pas été utilisés. « Je travaille toujours avec des stocks limités de chaque matière, c’est une contrainte mais ça me force à être d’autant plus créative et ça rend chaque paysage unique. » Elle travaille ses dessins, souvent à partir de photographies, puis les retranscrit au trait numérique comme un tableau graphique en soignant la composition et les perspectives, jouant sur la superposition des lignes et des formes et travaillant les mouvements et la lumière, de façon assez instinctive. Elle les assemble ensuite par collage pour former des paysages et ainsi upcycler la matière dans un nouvel usage. « À la manière d’un voyage, chacun y est libre d’imaginer sa propre histoire, son propre univers… Je crois que cet imaginaire, cette liberté est au cœur de mon projet. »
Thiane
Patchworks de (non) choix
Derrière Thiane, il y a Roxane, originaire du Nord et qui vit à Paris pendant 22 ans. Puis viennent le confinement et ses remises en question. En 2020, elle part avec sa fille s’installer à Biarritz, au plus près de l’Océan et de la nature.
La genèse
Roxanne crée Thiane en 2022, ayant à l’esprit cette idée d’upcycling depuis un moment. Elle a travaillé dans le prêt-à-porter pendant plus de 20 ans, dont 10 chez Roseanna, marque qu’elle a cofondée : « Lors de la création des collections, nous retenions beaucoup de références tissu, puis la sélection terminée, le non-choix des échantillons partait à la poubelle. J’ai eu envie de récupérer ces montagnes de robracks et de leur donner une seconde vie. J’ai contacté des maisons de prêt-à-porter et des showrooms textile pour les récupérer. Leur petit format m’a vite orientée vers le patchwork, technique merveilleuse pour recréer du tissu. »
La philosophie
Après toutes ces années dans la mode à Paris, Roxanne veut faire les choses autrement et consommer différemment. Cela doit impérativement passer par une autre manière de produire le vêtement, en upcyclant des matières existantes. Elle veut créer une marque écoresponsable et éthique, avec bienveillance, respect et transparence ; des pièces uniques et exclusives, qui ne se démodent pas et peuvent se transmettre.
Le cycle
Chaque pièce est fabriquée de manière artisanale. Les tissus réceptionnés sont triés par matière, typologie et saisonnalité, puis sélectionnés pour créer des harmonies de couleurs. Les patchworks réguliers (carrés de tissus) sont fabriqués par un Esat, et les irréguliers dans l’atelier biarrot de Thiane. Quand les panneaux de patchwork sont prêts, vient le choix des matériaux manquants : tissu pour les doublures corps et manches, boutons vintage chinés. Tout est prêt pour l’envoi en production, toujours artisanale. Chaque pièce fabriquée est produite comme un prototype de collection, certaines dans l’atelier biarrot et d’autres dans un atelier landais.
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Sélection à retrouver dans le HOME Magazine n°111 (mai-juin 2024), disponible en kiosque
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