Il y a sept ans, Lois et Arnaud ont un coup de cœur immédiat pour la vue dégagée sur l’horizon de cette bâtisse délaissée : « J’ai grandi les pieds dans l’eau. À défaut d’avoir la mer, je rêvais d’une vue sans aucun vis-à-vis, où le regard pourrait porter très loin. » C’est dans la région de Barcelone que Lois voit le jour et revient à l’âge de 14 ans pour s’y installer durant 20 ans. « Je m’y suis mariée et j’y ai donné naissance à ma fille Zoé, avant de rejoindre la France il y a douze ans. » D’abord à Bayonne où elle accueille son fils Hugo, puis à Lyon où son petit dernier Simon complète la famille il y a dix ans. Après quatre années en appartement, la tribu se sent à l’étroit et rêve d’un autre équilibre : « Arnaud était chef pâtissier et multipliait les horaires impossibles. J’étais souvent seule avec les enfants. Il fallait que mon mari change de rythme ; ça a été le déclencheur. » Le couple prospecte les maisons près de Lyon, mais les prix sont trop élevés pour la surface qu’ils recherchent. Ils étendent leur zone d’investigation, peu convaincus par l’idée de s’éloigner de la ville : « Après 40 minutes de route, on s’est demandé ce que l’on faisait dans cette voiture. Mais quand on a vu la maison, nos convictions et nos priorités ont immédiatement bougé : il nous la fallait. »
La maison d’Ali Baba
280 mètres carrés de charme, un terrain qui ouvre l’horizon et une dépendance laissent entrevoir à Lois la possibilité de s’épanouir dans son travail de photographe et son goût pour l’aménagement : « Je cherchais un espace pour faire et défaire. » Dans cette maison peu exploitée au cœur d’un terrain en friche, ont-ils réussi à se projeter ? « L’ancien propriétaire était un brocanteur nomade. Il n’utilisait pratiquement que la pièce principale pour entreposer ses objets et ses meubles. C’était une vraie caverne d’Ali Baba, mais tout était infusé de charme. »
Pour entrer dans la maison, il faut traverser une petite cour. Conquis par les extérieurs, Lois et Arnaud déchantent quelque peu en découvrant la première pièce de la bâtisse : « Elle était dotée d’un toit à la française très bas de plafond et peint en noir. » La déception est rapidement balayée par la découverte d’une autre pièce immense qui jouit d’une grande hauteur sous plafond. « Il y avait tout à refaire, mais ce fut un soulagement. » En s’installant, le couple commence par sabler le plafond sombre de l’espace cuisine. « À l’étage, le propriétaire avait déjà fait les branchements dans la salle de bains et le parquet dans les chambres. Même si rien n’était à notre goût, nous dormions dans des pièces habitables. »
Durant deux ans, la famille vit dans une partie de la maison et avance, brique après brique, vers l’aménagement final.
Un duo complémentaire
En partant de Lyon, Arnaud quitte aussi son travail de pâtissier pour se réinventer. Il profite de cette trêve pour se lancer pleinement dans ce grand chantier et se découvre une âme de bricoleur. « Il sait tout faire : électricité, plomberie, placo, parquet, salle de bains, fenêtres, étagères… », souligne Lois. Un talent qui tombe à pic, car la photographe aime modifier les espaces et moduler la décoration.
Pour assouvir ses envies en optimisant le charme sans vider son porte-monnaie, Lois se tourne vers la seconde main : « Je suis une chineuse feignante ! À la campagne, j’ai découvert des ressourceries qui sont ouvertes tous les jours ou des petites associations locales. Dès que je suis à la maison, j’y passe. J’aime trouver une place aux objets et aux meubles qui, dans un cadre désuet, ne sont pas mis en valeur. Il y a beaucoup d’éléments que je conserve, mais il y a aussi des choses que je revends. » En matière de décoration, Lois privilégie les beaux matériaux et les lignes authen- tiques : « C’est très instinctif, mon œil est attiré par l’ancien chaleureux auquel j’associe des pièces neuves. J’ai la chance d’être influenceuse et de pouvoir profiter de partenariats avec des marques qui m’inspirent. »
Et où naît son inspiration ? « Sans m’en rendre compte, j’ai compris que le fil rouge de ma décoration était la couleur verte. Je crois que je fais du mimétisme avec l’endroit où je suis. Ici, les arbres, les champs et les collines encerclent la maison. Nos grandes fenêtres sont alors comme des tableaux vivants de la nature. Je construis intuitivement ma décoration autour de ces images saisonnières pour être en harmonie avec l’environnement dans lequel je vis. »
Amour et dépendance
Parmi les projets du couple, la dépendance arrive bientôt à son terme : « L’idée est d’aménager un atelier de 100 mètres carrés pour faire mes shootings et organiser des ateliers photo. Arnaud, lui, aimerait proposer des ateliers de pâtisserie. » Une manière de concilier les activités du couple, en conservant la liberté de vivre à la campagne. « L’atelier restera neutre afin de moduler son aménagement en fonction de nos projets et de nos opportunités. » On aimerait rester des jours dans cet écrin à la chaleur saisissante. « Notre maison est en train de se transformer en fief familial. Chaque fois que l’on fait des choses, on les fait en pensant à nos enfants, à leurs amis, en se projetant. J’aimerais que ce lieu traverse le temps et se nourrisse des générations futures. Dans ma famille, il manquait un lieu pour se retrouver. Notre maison est devenue ce point de rencontre. Et les souvenirs sont déjà très nombreux… »
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